Lancement de la Chaire

Sur la photo, de gauche à droite : Me Jean-Claude Bachand, avocat-conseil, Fraser Milner Casgrain, Luc Vinet, recteur de l’Université de Montréal, Anne-Marie Boisvert, doyenne de la Faculté de droit, l’honorable Jean-Louis Baudouin, juge à la Cour d’appel du Québec et Benoît Moore, titulaire de la Chaire.

Allocution de M. Luc Vinet – Recteur de l’Université de Montréal

Monsieur le juge en chef,
Honorable juge Beaudoin,
Madame la doyenne,
Maître Bachand,
Monsieur Moore,
Mesdames et messieurs,

Le droit civil régit les droits et les obligations de chacun d’entre nous, il s’applique à tous les citoyens et citoyennes d’une société, sans exception.

C’est donc une chaire qui nous concerne tous que nous inaugurons aujourd’hui. La Chaire Jean-Louis Beaudoin en droit civil de l’Université de Montréal permettra à son titulaire de renouveler notre compréhension de ce qui constitue le fondement juridique de nos sociétés démocratiques : la responsabilité civile.

J’emploie à dessein le mot « responsabilité », car s’il y a une personne qui incarne de manière exemplaire l’engagement responsable au Québec, c’est bien l’homme qui prête son nom à cette nouvelle chaire.

Juge à la cour d’appel du Québec, grand architecte de la réforme du code civil du Québec, membre de la Commission de la réforme du droit du Canada et expert des questions éthiques et bioéthiques, le juge Jean-Louis Beaudoin compte parmi ces rares juristes qui ont transformé les bases de leur profession.

L’intégrité de son parcours, la profondeur de son engagement et la richesse de ses réalisations représentent tout ce que l’Université de Montréal cherche à promouvoir dans notre société.

La chaire que nous inaugurons aujourd’hui prouve qu’en philanthropie comme ailleurs, l’union fait la force. En s’unissant au juge Beaudoin pour soutenir financièrement la création de cette chaire, les membres de la communauté juridique ont, comme à leur habitude, fait preuve de jugement. Leur geste permettra à la Faculté de droit de cristalliser des compétences et des expertises qui, jusque-là, demeuraient éparses, et de mettre en place un véhicule privilégié pour la collaboration scientifique, la formation des étudiants et le transfert des connaissances.

Je remercie, très sincèrement, l’honorable juge Beaudoin et toutes les personnes et les organisations qui ont répondu à son appel pour soutenir les efforts de développement de notre Faculté de droit.

En terminant je veux féliciter le titulaire de la Chaire, Monsieur Moore, et lui souhaiter bonne chance dans la réalisation de ses projets.

Merci.

 

Allocution de l’honorable Jean-Louis Baudouin

 Lorsque, le 23 février 2000 on annonçait la création de cette chaire de droit civil, j’exprimais alors le souhait que cette initiative ait, pour effet, de stimuler le milieu juridique francophone et d’inciter celui-ci à se montrer, à l’image des universités anglophones, plus généreux envers leur alma mater.

Il est heureux de constater que, dans le milieu francophone les choses ont commencé à changer. J’en veux pour preuve l’existence de deux autres chaires récemment créées à la faculté de droit : celle en droit des affaires et commerce international et celle en droit des affaires et sécurité électronique, pour ne mentionner que celles-là.

Je suis particulièrement heureux ce matin d’assister donc au lancement officiel de cette nouvelle chaire dont la faculté de droit de l’Université de Montréal sera désormais dotée.

Certains pourront se demander pourquoi créer une chaire en droit civil, alors que tant de domaines nouveaux du droit méritent sans nul doute d’être privilégiés.

Il y a trois raisons principales à ceci. La première est que le droit civil est et restera toujours le centre même de la science juridique. Il représente le jus gentium, le droit du peuple. Il puise en effet ses racines, du moins dans les domaines comme le droit des obligations, dans l’histoire et dans la sagesse collective. En ce sens, il a donc un certain caractère de pérennité que ne possèdent pas d’autres domaines du droit soumis eux aux modes, aux changements sociaux ou économiques ou aux fluctuations politiques.

La seconde est qu’avec le nouveau Code civil de 1994, on assiste à un revirement du phénomène de publicisation du droit civil québécois. C’est désormais, dans certains domaines, comme par exemple celui de la responsabilité des collectivités publiques, une privatisation du droit public qui est en train de s’opérer, d’où l’importance de stimuler la recherche.

Enfin, sur le plan pédagogique, il ne fait pas de doute dans mon esprit que l’art du raisonnement juridique, la rigueur des syllogismes permettant de trancher les débats s’apprennent surtout, j’allais dire, presque exclusivement, par la méthodologie utilisée par le droit civil.

La création et le lancement de cette chaire doit beaucoup à certaines personnes que je me dois de remercier publiquement aujourd’hui.

Tout d’abord, mes remerciements vont aux autorités de l’Université de Montréal et de la faculté de droit. À l’Université tout d’abord, à son recteur. À la faculté de droit, à trois personnes en particulier. Au doyen Claude Fabien tout d’abord qui était aux commandes de la faculté au moment où la chaire a été lancée. Il a tout de suite compris l’importance de la démarche et l’a encouragée. Au doyen Jacques Frémont, maintenant vice-recteur. Jacques a, dès le début, cru en l’avenir de cette chaire et a réussi, grâce à ses efforts, à débloquer des fonds supplémentaires de l’Université qui ont permis d’accélérer grandement son lancement. Je tiens à le remercier tout particulièrement pour les efforts constants qu’il a déployés depuis l’an 2000 et pour sa fidèle amitié et à remercier l’Université pour sa généreuse dotation.

À Madame la doyenne Anne-Marie Boisvert, en second lieu, qui a eu la tâche particulièrement ardue de mettre sur pied les règlements de la chaire, de présider au choix (combien difficile devant l’excellence des candidats potentiels) de son titulaire et d’organiser avec Madame Rachel Brûlé la rencontre d’aujourd’hui.

Toute cette aventure n’aurait pas été possible, en troisième lieu, sans la collaboration et le dynamisme de ce très cher ami qu’est Me Jean-Claude Bachand, un de mes étudiants de ma première classe et de ma première année d’enseignement. En 2000, lorsque l’idée m’est venue de créer cette chaire et que je m’en suis ouvert à lui, c’est avec enthousiasme et la grande simplicité qu’on lui connaît qu’il a accepté de présider le comité chargé d’en recruter les fonds, comité qui s’est particulièrement bien acquitté de sa tâche. Lui et les membres du comité ont rempli ce mandat, souvent difficile, avec professionnalisme et efficacité. Sans ses efforts, cette chaire serait encore dans les limbes. Qu’ils trouvent ici l’expression de ma profonde gratitude.

En quatrième lieu, à tous les donateurs qui, par leur contribution financière, ont permis à cette chaire de voir le jour. Je serais bien embarrassé de leur adresser des remerciements nominaux ou individuels puisque, dès le début, j’ai tenu à ne jamais connaître leur nom pour des raisons évidentes liées à mon statut de juge.

Toutefois, je dois vous faire une confidence. Ma fille Christine, parce que je ne peux naturellement entendre les membres de son cabinet, m’a révélé, sous le sceau du secret le plus absolu, que celui-ci, le Cabinet Heenan Blaikie, avait contribué de façon significative à la chaire. C’est donc à lui, nominalement et à tous les autres contributeurs, qui pour moi resteront anonymes, que va l’expression de mes remerciements chaleureux.

Enfin, «last but not least» comme le disent nos concitoyens de langue anglaise, je tiens à féliciter publiquement le premier titulaire de cette chaire, M. le professeur Benoît Moore. Le connaissant bien, je suis convaincu qu’il saura lui donner le dynamisme et la profondeur intellectuelle qu’il manifeste lui-même dans ses activités de recherche et d’enseignement.

Constituer une telle chaire était un lourd défi qui n’a pu être relevé que par une coopération active et amicale de toutes les personnes que je viens de mentionner.

Inutile de vous dire que ce matin est, pour moi, un événement extrêmement important dans ma vie professionnelle. C’est, dans un certains sens, le couronnement de ma carrière de professeur, de chercheur et d’écrivain. C’est la façon que j’ai de remercier la faculté qui m’a procuré tant de joies et de passer la main ou le bâton aux plus jeunes. C’est pourquoi vous avez sans doute remarqué l’émotion que je vous avoue avoir du mal à maîtriser.

Chers collègues, chers amis, merci de votre présence. Encore une fois, merci à tous ceux et celles qui ont été associés à ce projet. Je vous donne rendez-vous l’automne prochain pour la première manifestation académique de la chaire.

Allocution de Me Benoît Moore – Titulaire de la Chaire

Monsieur le juge Jean-Louis Baudouin,
Monsieur le juge en chef du Québec,
Monsieur le Recteur,
Madame la Doyenne,
Chers collègues, chers amis,

Soyons académique. En deux idées, ce que je ressens aujourd’hui : Honneur et vertige.

– Honneur
Honneur à la fois par le nom que porte la chaire et par la tradition qui entoure l’objet de celle-ci, le droit civil, à la Faculté.

Le nom de la Chaire.

Être associé à Jean-Louis Baudouin relève indubitablement de l’honneur et ce pour l’ensemble de ce qu’il est et de ce qu’il représente pour la communauté facultaire, universitaire, juridique et, pourrait-on ajouter, pour la société québécoise dans son ensemble. Pour affirmer cela je pourrais tout d’abord m’autoriser de son titre de docteur en droit de Paris obtenu à l’âge de 24 ans seulement ; de son rôle majeur dans l’effort et la réussite du Code civil du Québec ; de ses 27 ans d’enseignement à notre Faculté ; de sa fonction, depuis 17 ans, comme juge à la Cour d’appel.

Je pourrais aussi m’autoriser des marques de reconnaissance d’institutions sœurs, d’association, de corporations professionnelles multiple. Ainsi Monsieur Baudouin a reçu, entre autre, 4 doctorats honoris causa ; le prix Ramon John Hnatyshyn décernée par le Barreau canadien (2004) ; la médaille d’honneur et le prix d’excellence du Barreau du Québec (1988) ; le Prix Yves Pélicier de l’Académie internationale de droit et de santé mentale (2001) ; la médaille du 125e anniversaire de la Faculté de droit de l’Université de Montréal (2004) ainsi que la médaille Henri Capitant à 3 reprises. Il a aussi été reçu membre de la Société Royale du Canada (1979) ; il est académicien de l’Académie internationale de droit comparé (1984) de l’Académie des lettres du Québec (1991) ; vice-président international de l’Institut des droits des pays d’expression française et Président de la section québécoise de l’association Henri Capitant.

Je pourrais évidemment aussi m’autoriser de son rôle majeur, de pionnier à bien des égards, dans l’édification d’une doctrine civiliste québécoise. Non pas qu’avant la publication en 1970 et 1973 de ses ouvrages sur les obligations et la responsabilité, ouvrages qui sont devenus des classiques de la littérature juridique et dont, reconnaissance ultime, la pérennité est assuré, non pas, donc, que la doctrine québécoise n’existait pas mais les livres du Professeur Jean-Louis Baudouin allaient contribuer à la création d’un nouveau genre littéraire juridique axé vers le public étudiant tout en ne délaissant pas celui des praticiens. En ce sens nous pourrions avancer que les livres du Professeur Baudouin ont joué un rôle analogue à ceux des Leçons de droit civil des Mazeaud dans les années 30 en France. Mais à ces ouvrages, fondamentaux, lesquels sont devenus des «livres réflexes» pour les juristes, on doit aussi ajouter d’autres ouvrages, sur l’éthique de la mort et de la procréation, autre domaine de prédilection du Professeur Baudouin et dans lequel sa réputation dépasse largement nos frontières.

Enfin, et de façon tout aussi importante, spécialement aujourd’hui, je pourrais m’autoriser de Jean-Louis Baudouin lui-même, de l’homme, de ses qualités d’humaniste ; du rôle qu’il joue, pour moi et pour tant d’autres jeunes collègues, dans la relève universitaire en droit civil ; du gastronome et de l’oenophile, il est, entre autres, vigneron d’honneur de la Jurade de St-Émilion, de la Confrérie de St-Vincent dans le Beaujolais et Bailli d’honneur de Lalande de Pomerol. Il ne faut pas négliger, ici encore, le rôle de la vigne dans l’élaboration du droit civil, Portalis lui-même n’était-il pas vigneron et le Châteu Pradeaux, en Bandol, n’appartient-il pas encore à ses héritiers. Mais il faut surtout parler de Jean-Louis Baudouin le mécène qui a fait une donation majeure afin de rendre au droit civil la vitrine qui lui revient. De ce don naquit donc le projet de chaire lequel a été initialement lancé en février 2000, lors d’une cérémonie sous la présidence du doyen de l’époque Claude Fabien. Février 2000, le mois exact de ma nomination comme professeur adjoint à la Faculté. Comme quoi les chemins se croisent et se recroisent. Ce don de départ est tout particulièrement significatif non seulement par son montant mais aussi parce qu’il dénote un attachement à l’institution qui n’est pas banal et qu’il a été déterminant dans la réussite de la capitalisation de la chaire, réussite qui par ailleurs, n’est jamais terminée.

La tradition.

Honneur aussi par la tradition ; celle du droit civil, à notre Faculté. Cette tradition elle est longue, elle est belle. Elle a été marquée par des juristes, d’ici ou d’ailleurs, qui ont façonné la vie de notre institution et de notre droit. Pensons aux premiers professeurs : Thomas Loranger, auteur de célèbres commentaires sur le Code civil du Bas-Canada, à Maximilien Caron, premier professeur de carrière ou à Albert Mayrand. Puis à cette nouvelle génération dans les années 60, 2e génération à peine de professeurs de carrière dont fait partie Jean-Louis Baudouin. Pensons aux différents professeurs invités, tel René Demogue, Jacques Flour ou René Savatier. Pensons aux différents docteurs honore causa : Henri Mazeaud, Georges Ripert ou Henri Capitant. Pensons enfin au rôle central de nos collègues civilistes dans l’élaboration du Code civil du Québec dont, outre Jean-Louis Baudouin, Roger Comtois, Albert Mayrand, André Morel, Jean Pineau et Adrian Popovici.

C’est donc un honneur pour moi, que de pouvoir être associé à cette tradition dans sa modernité. Comment ne puis-je pas être honoré d’avoir eu comme premier professeur en droit civil, le Professeur Jean Pineau, d’avoir eu comme co-directeur de maîtrise Jean-Louis Baudouin et d’avoir comme co-auteur le professeur Didier Lluelles.

Comment enfin ne pas être honoré de participer à la construction de ce qui est la 1ere Chaire de droit civil dans l’histoire de notre faculté et ce malgré le fait qu’il y ait eu, jadis, un multitude de chaires dans des sujets aussi variés que le droit romain, le droit des transports ou le droit commercial. De cet honneur, de ces honneurs, dont je remercie la doyenne et tous ceux qui ont cru bon devoir me faire confiance, vient le contre-poids : le vertige.

Le vertige.

Le vertige c’est le sentiment que je ressens face à ce nom et à cette tradition dont je dois tenter de me faire le porte-parole, l’animateur, mais également face au défi que ce rôle représente. Une chaire doit se définir, elle peut être d’enseignement, de recherche ; elle peut aussi être de rayonnement. La Chaire Jean-Louis Baudouin prendra un peu de tous ces visages, mais elle en sera surtout une de rayonnement, non pas de son sujet, mais bien de son objet, le droit civil. En cela il est nécessaire de déterminer le domaine des activités de la Chaire pour ensuite en présenter les objectifs et les moyens.

Le domaine de la Chaire est nécessairement vaste ; il comprend le droit civil en tant que système mais aussi le droit civil dans ses manifestations disciplinaires. Sur le plan systémique le droit privé vit actuellement une période de mouvance, de transformation tant ici qu’en Europe. Nous avons vécu au début des années 1990 un changement majeur, non banal, en l’adoption d’un nouveau Code qui se voulait moderne et qui a mis la personne au centre des enjeux. L’Europe, et la France en particulier, vit quant à elle une période qui la mènera peut-être à une transformation de son droit privé, et tout particulièrement de son droit des obligations. Plusieurs projets, dont le dernier en date maintenant connu sous le nom de Rapport Catala, circulent et une lutte de pouvoir entre les différents systèmes, tout particulièrement la common law d’un côté et les systèmes romano-germanique de l’autre, prend forme. En guise d’exemple, s’agit simplement de voir la réaction qu’ont réservé les communautés juridiques et politiques françaises à la publication d’un rapport intitulé Doing Business préparé par la Banque Mondiale et qui concluait que le système de droit civil, et plus particulièrement celui de la France, était mal adapté au monde des affaires dû à son manque de flexibilité.

Ces discussions ne sont pas qu’européennes ; elles illustrent qu’ici et ailleurs, le droit civil est un fort marqueur identitaire et qu’il fait face à des défis liés à l’acculturation des droits. Ces discussions interpellent donc l’ensemble des communautés juridiques et nous avons un rôle unique à y jouer tant par notre récente expérience de codification, notre rattachement à la famille romano-germanique, que par notre réalité historique et géo-politique qui ont fait dire à Louis Baudouin du droit québécois qu’il était un modèle vivant de droit comparé.

Ce sont ensuite les différentes disciplines du droit civil que la Chaire verra à faire rayonner. Le droit civil recoupe un champ très large de domaines et je n’entends pas restreindre les activités de la Chaire à certains domaines spécifiques qui seraient nécessairement les miens ; ce qui serait artificiellement réducteur. En ce sens la Chaire n’aura pas, du moins à court terme, d’axes de recherches limitatifs. Elle tentera plutôt, par ses activités d’englober le plus grand nombre de domaines afin de démontrer la vitalité du droit civil, son caractère moderne et mettre en exergue son rôle dans l’arbitrage des enjeux fondamentaux de la société.

Cependant si le droit civil est extrêmement tentaculaire, des idées maîtresses peuvent s’en détacher. Le droit civil c’est d’abord le droit des gens, le droit de l’équilibre. Le respect de l’équilibre existant, c’est la fonction réparatrice du droit civil, mais aussi l’aménagement d’un nouvel équilibre, par ses fonctions régulatrices et, plus récemment, protectrice, protectrice contre les vulnérabilité physique, psychologique ou économique des personnes. Cette valeur de l’équilibre est, et doit être, au centre des préoccupations, d’une manière ou d’une autre des civilistes, que cela soit en matière de droit de la famille, du droit des personnes, des sûretés ou des obligations. Nous tâcherons de faire ressortir cet esprit du droit civil dans nos activités et nous tenterons de le faire en adéquation et en collaboration avec les autres chaires ou centre de recherche de la Faculté, que cela soit, par exemple, la Chaire du notariat, du droit des affaires ou encore du commerce électronique.

Afin de réussir à faire ressortir le mieux possible cette réalité plurielle le comité scientifique de la Chaire sera composé de juristes provenant de domaines complémentaires. Ainsi de la Faculté y siègeront la professeure Élise Charpentier spécialisée en droit des biens et des sûretés, le professeur Patrice Deslauriers spécialisé en droit de la responsabilité civile et le Professeur Didier Lluelles, spécialisé en droit des obligations et des assurances.

Se joindront à eux le Professeur Jean-Guy Belley de l’Université McGill directeur du Centre de Recherche en droit privé et spécialiste de la sociologie juridique et de la théorie du contrat et Me Serge Gaudet, ancien Professeur à notre Faculté et présentement associé au sein du cabinet Heenan Blaikie. La composition de ce conseil scientifique permettra à la Chaire à la fois d’englober l’ensemble des différents domaines du droit civil mais aussi de lui permettre d’inclure dans ses activités les autres facultés québécoises ainsi que le milieu de la pratique afin que le rayonnement de la Chaire puisse être à la fois universitaire et communautaire.

Universitaire tout d’abord. Le droit civil est un domaine dans lequel peu d’étudiants poursuivent leurs études supérieures, ces étudiants recherchant plutôt des domaines plus spécialisés. Il s’agit ici, non pas nécessairement de se battre contre cette réalité, mais d’assurer que l’on prenne conscience du rôle que joue le droit civil dans tous ces domaines en tant que force unificatrice et véritable fond commun du droit. La venue de professeurs et de chercheurs étrangers lesquels interviendront dans des enseignements aux cycles supérieurs sera donc envisagée afin de créer une synergie entre les étudiants et le corps professoral et ainsi viser la pérennité du droit civil dans la vie universitaire.

Le rayonnement en sera aussi un communautaire. Il est aussi important que le monde universitaire et celui de la pratique, que cela soit le Barreau, la Chambre des notaires ou la magistrature, puissent se rencontrer et ces forums d’échanges ne sont pas toujours assez nombreux. La Chaire verra à créer certaines de ces rencontres.

À court terme, et pour terminer, je peux déjà vous inviter à la toute première activité de la Chaire Jean-Louis Baudouin, laquelle sera une grande conférence inaugurale qui se tiendra le jeudi 19 octobre à la Faculté de droit. La Professeure Camille Jauffret Spinosi, de l’Université Panthéon Assas – Paris II et de l’Institut de droit comparé de Paris, comparatiste réputée qui a repris l’ouvrage de René David sur les grands systèmes de droit comparé, a accepté de prononcer cette conférence, dont le thème sera «Le temps et le droit civil». D’autres activités également seront organisées tout au long de l’année, nous vous en tiendrons au courant et, je l’espère, vous y participerez en grand nombre.

Sur ce il me reste, une fois encore, à remercier en votre nom à tous, le juge Jean-Louis Baudouin du geste qu’il a posé et de nous souhaiter que l’on en soit digne. Merci.

 

 

Allocution d’Anne-Marie Boisvert – Doyenne de la Faculté

– Monsieur le recteur
– Monsieur le juge en chef
– Monsieur le juge Baudouin
– Messieurs et mesdames les juges
– Chers collègues
– Chers amis

Permettez-moi d’abord de vous souhaiter la plus cordiale bienvenue à l’Université de Montréal, à l’occasion du Lancement officiel de la Chaire Jean-Louis Baudouin de la Faculté de droit.

La Chaire Jean-Louis Baudouin en droit civil que nous lançons aujourd’hui résulte de la générosité de Jean-Louis, bien sûr, mais aussi de celle de nombreux partenaires qui avaient non seulement beaucoup d’admiration pour ce grand juriste mais qui ont fait confiance à la Faculté de droit de l’Université de Montréal et choisi d’investir dans ce projet important. Au-delà des modes, la Chaire Jean-Louis Baudouin fournit un outil essentiel de promotion du droit civil, de l’enseignement et de la recherche en droit civil et je vous en remercie grandement. Je tiens aussi à remercier le doyen Claude Fabien qui, avec la complicité de Jean-Louis, a été l’initiateur de ce projet qui voit le jour aujourd’hui.

J’inviterais maintenant le recteur de l’Université de Montréal, Monsieur Luc Vinet, à nous adresser quelques mots.


Merci Monsieur Vinet,

Les grands projets sont généralement faciles à élaborer. Généralement toutefois, l’argent ne tombe pas du ciel et les donateurs ne nous courent pas après. J’inviterais maintenant Me Jean-Claude Bachand, avocat conseil chez Fraser Milner Casgrain, ami de Jean-Louis et ami de la Faculté, qui n’a pas ménagé ses efforts pour faire de la campagne de sollicitation le succès que nous célébrons aujourd’hui, à nous dire quelques mots.


Merci Me Bachand, merci encore une fois de l’énergie que vous avez déployée et de votre soutien indéfectible. C’est grâce à des bénévoles comme vous que les grands projets voient le jour.

La chaire que nous lançons aujourd’hui porte le nom de l’honorable Jean-Louis Baudouin. Je l’ai mentionné, à l’origine du projet il y a un don majeur de Jean Louis. Mais il y a plus. En fait, associer le nom de Jean-Louis Baudouin à une Chaire en droit civil, c’était naturel. Jean-Louis, un éminent juriste et grand humaniste du droit contemporain, est une source d’inspiration dans la communauté juridique en général et dans la communauté des civilistes en particulier.

Le juge Baudouin a connu une carrière exceptionnelle, consacrant sa vie à défendre les valeurs qui définissent la société québécoise, tout d’abord à notre Faculté en tant que professeur pendant plus d’un quart de siècle, comme juge à la Cour d’appel du Québec pendant plus de dix ans, comme artisan de la réforme du Code civil du Québec, comme membre de la Commission de réforme du droit du Canada et, plus généralement, comme expert des questions morales difficiles.

Jean-Louis, je ne peux résister à la tentation, et je me le permets parce que je ne suis pas la seule à qui c’est arrivé, de témoigner de ma première expérience dans le monde juridique. Il est 9h30, c’est notre premier cours et la classe est un peu ébranlée par la traditionnelle farce du faux prof qui vient de se terminer. Tu fais ton entrée, tu nous parles des obligations, nous sentons ta science, ton humour, ton plaisir à nous enseigner et nous sommes convaincus d’être extrêmement privilégiés. Une belle aventure vient de commencer.


Je te demanderais maintenant de venir nous adresser quelques mots.

Il me reste maintenant à vous présenter le professeur Benoît Moore, premier titulaire de la Chaire Jean-Louis Baudouin.

Benoît Moore détient un baccalauréat en droit de notre Faculté et est titulaire d’une maîtrise dirigée à l’époque par nul autres que les professeurs Jean-Louis Baudouin et Christianne Dubreuil. Il obtient ensuite, avec mention, un diplôme d’études approfondies en droit privé de l’Université Paris I. Il est professeur à la Faculté de droit depuis l’an 2000.

Boursier du CRSH et du FCAR, récipiendaire de plusieurs prix et distinctions, Benoît Moore a reçu, en 2004, la Médaille de l’Association Henri-Capitant. Le temps considérable que le professeur Moore consacre à ses étudiants ne l’a pas empêché, au plan de la recherche, de produire un nombre impressionnant de textes qui l’ont rapidement – et très avantageusement – fait connaître au sein de la communauté juridique québécoise. Sa contribution au développement du droit de la famille est particulièrement remarquable et remarquée. Ses articles sur la famille et sur la filiation offrent des réflexions critiques importantes sur les changements majeurs affectant des institutions juridiques séculaires.

Membre de plusieurs associations, il est notamment Secrétaire général de la section québécoise de l’Association Henri-Capitant depuis 2004. Il a d’ailleurs contribué à l’organisation des Journées canadiennes de cette association tenues à Montréal et à Québec en 2004 et coprésidé le comité régional des fêtes du bicentenaire du code civil français et du 10ième anniversaire du Code civil du Québec, fêtes qui se sont avérées un réel succès.

Il est clair que nous sommes en présence d’un jeune collègue qui exerce déjà son leadership intellectuel au sein de la communauté des privatistes québécois et est en voie de l’exercer pleinement au plan national et international. Benoît Moore sera d’ailleurs professeur invité ces prochains jours à l’Université Paris II.

Enfin, la doyenne que je suis ne peut passer sous silence la remarquable générosité du professeur Moore qui est toujours prêt à rendre service ou à s’impliquer dans la vie facultaire et universitaire. À la Faculté, malgré son jeune âge, Benoît Moore est un leader naturel, tant au plan intellectuel qu’au plan humain. Il a toujours fait preuve d’un jugement sûr et est constamment à la recherche de consensus. Membre du Conseil de la Faculté, Benoît Moore représente la Faculté à l’Assemblée universitaire.

 

Allocution de Me Jean-Claude Bachand

 Il y a maintenant plus de 40 ans, dans ces mêmes locaux, à côté, dans ce qui portait à l’époque le nom de U-2 (bien avant qu’un quelconque groupe de chanteurs populaires ne viennent se l’approprier tout à fait illégalement), le Professeur Jean-Louis Baudouin rencontrait, pour son cours de droit des obligations, les étudiants de première année. C’était en 1963. Des liens uniques furent alors créés: Jean-Louis était notre premier professeur, à notre premier cours. Et nous, nous étions ses premiers élèves, également à son premier cours. Nous étions tous des petits nouveaux…

Il nous a légués, cette année-là, avec ses talents didactiques remarquables, la clarté de sa logique, son humour et son entregent, un enthousiasme et une passion pour le droit civil du Québec et une appréciation unique de son importance dans le développement et le caractère distinct de la société québécoise.

Cet enthousiasme et cette passion, Jean-Louis Baudouin les a également partagés pendant plus de 25 ans avec des générations de futurs juristes.

J’ai toujours été émerveillé par son sens aigu de la rigueur intellectuelle et de la discipline, indispensables à la réalisation des objectifs qu’il se fixait, ainsi que par la diversité de ses intérêts académiques et personnels : professeur, conseiller juridique, plaideur, écrivain, juge, conférencier, acteur de premier plan dans la réforme du droit civil du Québec, participant actif des sociétés internationales de droit civil, grand voyageur, et surtout, j’allais l’oublier, oenophile réputé.

J’ai été encore plus impressionné, au fil des ans, par la qualité de ses réseaux personnels et l’importance primordiale qu’il a toujours accordée à la fidélité envers ses amis.

Même si j’avais déjà refusé, dans les semaines précédentes, deux invitations pour présider des comités de levée de fonds dans des domaines sociaux et culturels, vous comprendrez pourquoi je n’ai pas hésité un seul instant quand Jean-Louis m’a fait part de ses projets de Chaire et m’a demandé si j’accepterais de m’y impliquer de façon active. J’en ai été au contraire très honoré… En fait, s’il me l’a demandé à moi, c’est peut-être aussi parce que j’étais encore l’un des rares au Québec à savoir épeler son nom sans faire de faute d’orthographe.

Cette campagne de levée de fonds était cependant bien particulière en ce qu’elle se situait déjà à l’intérieur de la campagne plus globale de financement de l’Université de Montréal et que, dès lors, instructions spécifiques nous avaient été données de ne pas solliciter d’entreprises –mon réseau privilégié – et de se limiter à des donations de personnes… qui, par ailleurs, seraient aussi approchées, à divers titres, dans le cadre de cette même campagne. Malgré ces balises, les réponses ont été enthousiastes. Plusieurs, dont certains sont parmi nous ce matin, ont accepté de devenir des patrons d’honneur et, en plus d’une contribution personnelle significative, se sont impliqués directement et ont mis leur propre réseau au profit de la Chaire. Je les en remercie très vivement. Sans eux, cette Chaire n’aurait pas vu le jour.

La Chaire n’aurait pas non plus vu le jour, et il faut le souligner, sans l’appui soutenu de l’Université de Montréal et des doyens de la Faculté de droit (Claude Fabien, Jacques Frémont et Anne Marie Boisvert) dont les responsables ont bien compris l’importance d’honorer ainsi quelqu’un qui avait depuis longtemps fait la renommée de l’institution. Tous ceux que nous avons rejoints dans le cadre de nos efforts, ont tenu à nous témoigner de leur respect et leur enthousiasme pour « l’œuvre » de Jean-Louis. Chacun avait son anecdote quant à l’influence qu’il avait eue dans leur carrière, et tous reconnaissaient surtout l’importance de sa contribution au développement du droit civil et donc, à celui de la société québécoise.

C’est donc avec beaucoup de plaisir que j’ai l’honneur ce matin, au nom des parrains d’honneur et de tous les donateurs de redire à Jean-Louis à quel point nous nous sentons privilégiés d’avoir été associés à la création de cette Chaire à laquelle nous souhaitons longue vie.

Ce contenu a été mis à jour le 29 août 2017 à 23 h 44 min.

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